Jean, le témoin énigmatique

Du 24 août au 8 septembre, 2022

Digression

Décidément, j’ai du mal à avancer avec cet évangile : c’est le personnage de « Jean le Baptiste » qui me fait buter maintenant et la question que soulèvent des exégètes/chercheurs aujourd’hui : Jean Baptiste (ou le baptiseur) a-t-il reconnu Jésus comme Celui dont il préparait la venue et les paroles qu’on lui attribue dans le texte de cet évangile sont-elles vraiment de lui et n’auraient-elles pas été mises dans sa bouche délibérément pour faire taire la polémique qui aurait continué  à exister entre ses disciples et ceux de Jésus ?

Évidemment, on devrait dire humblement qu’on ne peut pas le savoir…ce qui fait problème ici, n’est pas particulièrement la méfiance des exégètes envers un Jésus trop exalté et donc trop divin ( ce qui est quand même sous-jacent) c’est le fait qu’effectivement, on a dans l’évangile de Mathieu, un passage où  le Jean emprisonné , se met à douter que Jésus soit « celui qu’il attendait :

 Jean, qui avait entendu parler dans sa prison des oeuvres du Christ, envoya ses disciples pour lui dire : Es-tu celui qui vient ou devons-nous en attendre un autre ? Jésus leur répondit : Allez, rapportez à Jean ce que vous entendez et voyez : les aveugles retrouvent la vue et les boiteux marchent ; les lépreux sont rendus purs, les sourds entendent, les morts ressuscitent, et l’évangile est annoncé aux pauvres ; et bienheureux quiconque ne sera pas scandalisé à mon sujet » (Matt. 11 : 2-6)

Selon donc certains, Jean n’aurait pas pu faire les affirmations sur l’identité de Jésus qui sont faites dans les échanges rapportés dans le texte de Jean….et quelque temps après douter…

A titre personnel , il me semble que cette question vient de personnes qui n’ont jamais été emprisonnées… et ne comprennent pas que quand on est dans un cachot , on peut être en proie à toute sorte de doutes du genre, « Dieu pourquoi m’as tu abandonné » et remettre en cause le sens de ce qu’on a cru comprendre, ou entendre dire… surtout quand ce sont des expériences extra -sensorielles,  comme celle d’entendre une voix  venue du ciel au moment où Jésus a été baptisé… leur souvenir peut perdre de leur réalité : le concret et le réel, maintenant c’est uniquement ce cachot malodorant où l’on se trouve confiné…. Tout le reste semble bien loin et irréel.

Mais aussi, c’est oublier que la figure messianique que Jean avait comme celle de tous les disciples d’ailleurs, était de quelqu’un qui reviendrait rétablir Israël sur son trône . Son emprisonnement dans ce cachot était la preuve que ce jour n’était pas venu et que Jésus ne semblait pas l’homme providence, futur roi des Juifs qui pourrait renverser le pouvoir romain. Le scandale de Jésus est justement qu’il n’a pas répondu aux attentes des gens qui l’entouraient.

Les recherches que l’on a pu faire sur cette époque est qu’effectivement, les attentes étaient multiples et on était toujours à l’affût de la manifestation du Messie. D’ailleurs, il faut reconnaître que les figures messianiques et leurs caractéristiques sont éparses et diverses dans les écrits des prophètes. Il n’y a pas un seul passage où il y ait un portrait bien défini et précis qui permettrait de l’identifier facilement à première vue…, comme une auréole autour de la tête ou une tunique blanche, une barbe et un regard lumineux et perçant ( on ne lui donne plus des yeux bleus au moins maintenant) comme on nous le montre dans des images pieuses ou même dans les films ! Personne a l’époque n’aurait pu imaginer que cet homme insignifiant de Nazareth serait connu 2000 ans après surtout considérant qu’il avait terminé exécuté sur une croix…

Finalement, en ce qui me concerne, la valeur des évangiles et ce qui accroît leur marque d’authenticité, c’est que ceux qui les ont rédigés et compilés n’ont pas essayé de les « harmoniser », c’est à dire de les modifier pour qu’ils concordent en tout afin qu’ils passent un test d’uniformité. Derrière la rédaction de ces textes, il y a les témoignages de différentes personnes qui non seulement n’ont pas toutes vues la même chose, mais aussi ceux de différentes communautés qui ont choisi de garder et de rapporter telle ou telle information car elle était la plus crédible mais aussi la plus pertinente pour eux.

Le « réel historique » n’est pas une masse homogène et lisse de faits multiples faciles à reconstituer surtout quand il s’agit de personnes qui comme Jésus ont suscité d’un côté une foi inconditionnelle et d’un autre un rejet et un soupçon systématique… On oublie la complexité du présent, le passé raconté simplifie toujours les options en donnant une illusion de clarté et d’inévitabilité…

Me voilà partie dans des digressions qui m’éloignent du texte lui-même, mais je ne peux l’aborder sérieusement sans examiner les polémiques qu’il suscite encore aujourd’hui. Même si je ne crois pas à une transcription mot à mot de ce que Jésus ou Jean aient pu dire, (qui n’aurait pas de sens d’ailleurs car ils ne se sont pas exprimés dans les langues dans lesquelles ces textes ont été écrit), ce serait jeter une suspicion infondée sur ceux qui sont à l’origine de ces lignes que de ne pas leur reconnaître un socle historique : ce n’était pas des charlatans…Il faut leur reconnaître un minimum de bonne foi et faire descendre d’un cran notre arrogance de gens du 2ème millénaire.

Bref, passons aux choses sérieuses

* * *

Jean : Qui es-tu ? Jean 1:19-28

Voici le témoignage de Jean, lorsque les Juifs envoyèrent de Jérusalem des sacrificateurs et des Lévites, pour lui demander: Toi, qui es-tu?

Il déclara, et ne le nia point, il déclara qu’il n’était pas le Christ.

Et ils lui demandèrent: Quoi donc? es-tu Élie? Et il dit: Je ne le suis point. Es-tu le prophète? Et il répondit: Non.

Ils lui dirent alors: Qui es-tu? afin que nous donnions une réponse à ceux qui nous ont envoyés. Que dis-tu de toi-même?

Moi, dit-il, je suis la voix de celui qui crie dans le désert: Aplanissez le chemin du Seigneur, comme a dit Ésaïe, le prophète.

Ceux qui avaient été envoyés étaient des pharisiens.

Ils lui firent encore cette question: Pourquoi donc baptises-tu, si tu n’es pas le Christ, ni Élie, ni le prophète?

 Jean leur répondit: Moi, je baptise d’eau, mais au milieu de vous il y a quelqu’un que vous ne connaissez pas, qui vient après moi;

je ne suis pas digne de délier la courroie de ses souliers.

Ces choses se passèrent à Béthanie, au delà du Jourdain, où Jean baptisait.

(Jean, présenté comme le témoin crédible et respecté a été mentionné au début de cet évangile au milieu de réflexions profondes sur la nature de Jésus/le logos/lumière etc. .. maintenant que le récit de son histoire commence, c’est Jean comme dans l’évangile de Marc dont on parle en premier.)

Sur la scène apparaissent les hautes autorités religieuses de l’époque qui ont entendu parler de Jean et qui font leur enquête, ce qui est leur responsabilité. Toutes les informations que l’on a sur cette époque est justement que proliféraient ( des dizaines plutôt que des centaines) de prédicateurs/rabbins de toutes sortes qui annonçaient l’avènement d’événements politico-religieux ( les deux étaient liés) comme le rétablissement d’Israël et aussi se disaient être le Messie qui présiderait à ce rétablissement. L’atmosphère était volatile dans ce territoire occupé et ils étaient soucieux quand quelqu’un qui se revendiquait des écritures devenait populaire étant donné le risque qu’il prenne la tête d’une révolte qui serait réprimée dans le sang. Ils feront la même chose quand ce sera au tour de Jésus d’être sur le devant de la scène.

Voici le témoignage de Jean, lorsque les Juifs envoyèrent de Jérusalem des sacrificateurs et des Lévites, pour lui demander: Toi, qui es-tu?

Il déclara, et ne le nia point, il déclara qu’il n’était pas le Christ.

La première question qui lui est posée est celle qui est naturellement la plus importante pour des autorités religieuses qui se préoccupaient de l’avenir d’Israel : es-tu le Messie. On est étonné qu’il n’y ait pas de caractère polémique dans la question comme avec les échanges avec Jésus : la question est claire autant que la réponse : Jean n’élabore pas et ne cherche pas à créer l’ambiguité, ce n’est pas son style.

 Ceux qui avaient été envoyés étaient des pharisiens

Ils lui firent encore cette question: Pourquoi donc baptises-tu, si tu n’es pas le Christ, ni Élie, ni le prophète?

La seconde, donc vient des pharisiens qui n’étaient pas mentionnés plus haut. ( certains pensent qu’il s’agit de deux occasions différentes regroupées ici, mais peu importe). Plus pointilleux, plus curieux, ils ne veulent pas s’en tenir là….et lui demandent s’il était Elie. Pourquoi Élie parce que c’était lui qui devait annoncer la venue du Seigneur ou du jour du Seigneur selon les interprétations de la prophétie de Malachie…( ils ne croyaient pas nécessairement que le prophète Élie allait revenir…mais c’était au sens figuratif)

« Voici, j’enverrai mon messager; Il préparera le chemin devant moi. Et soudain entrera dans son temple le Seigneur que vous cherchez; Et le messager de l’alliance que vous désirez, voici, il vient, Dit l’Eternel des armées. Qui pourra soutenir le jour de sa venue? Qui restera debout quand il paraîtra? Car il sera comme le feu du fondeur, Comme la potasse des foulons. Il s’assiéra, fondra et purifiera l’argent; Il purifiera les fils de Lévi, Il les épurera comme on épure l’or et l’argent, (3 : 1-3) »

« Voici, je vous enverrai Elie, le prophète, Avant que le jour de l’Eternel arrive, Ce jour grand et redoutable. 4:5 »

(quelque soit la date de l’écriture de cet évangile, il reste incontestable que l’échange entre Jean et ses interlocuteurs ici, représente bien ce que l’on peut s’attendre de la compréhension qu’avaient les contemporains de Jésus et de Jean, des écritures juives. Leur langage, et leur utilisation du passage de Malachie, montre que de part et d’autre, il y avait une compréhension commune de ce passage au point, où il ne semblait pas nécessaire de préciser qu’ils s’en référaient à Malachie.  )

Ils lui dirent alors: Qui es-tu? afin que nous donnions une réponse à ceux qui nous ont envoyés. Que dis-tu de toi-même?

Moi, dit-il, je suis la voix de celui qui crie dans le désert: Aplanissez le chemin du Seigneur, comme a dit Ésaïe, le prophète.

Cette fois-ci, Jean cite un prophète et on continue à reconnaître un échange entre personnes bien versées dans la foi juive et ses écritures. Voilà une citation plus longue pour nous qui sommes plutôt des ignoramus dans ce domaine…

Une voix crie: Préparez au désert le chemin de l’Eternel, Aplanissez dans les lieux arides Une route pour notre Dieu. Que toute vallée soit exhaussée, Que toute montagne et toute colline soient abaissées! Que les coteaux se changent en plaines, Et les défilés étroits en vallons! Alors la gloire de l’Eternel sera révélée, Et au même instant toute chair la verra; Car la bouche de l’Eternel a parlé.

Toute la question pour nous aujourd’hui est de savoir comment Jean et les pharisiens interprétaient cette révélation : si elle était messianique ou eschatologique (parlant de la fin des temps) car le fait propre des textes prophétiques c’est d’être écrits dans un langage imagé et symbolique qui suppose une interprétation pour savoir comment ils s’appliquent à une situation historique précise.

 Jean leur répondit: Moi, je baptise d’eau, mais au milieu de vous il y a quelqu’un que vous ne connaissez pas, qui vient après moi;

je ne suis pas digne de délier la courroie de ses souliers.

Ces choses se passèrent à Béthanie, au delà du Jourdain, où Jean baptisait.

Jean donc ne leur répond pas de qui il s’agit : il ne nomme pas Jésus, par prudence ? Pour le protéger ? Parce qu’il ne sait pas encore que ce serait Jésus qui viendrait après lui car ça ne lui avait été révélé qu’au moment de son baptême ? Il annonce sa venue «après » lui mais en même temps il dit qu’il est déjà là , ce qui laisse penser qu’au moment de cet échange, Jésus ne se serait pas encore manifesté… Il ne dit pas non plus si lui, il le connaît, mais  il affirme sa prééminence : l’expression digne de délier les courroies de ces chaussures est bien connue de ses interlocuteurs pour ne pas avoir besoin d’explication. On pourrait parler de modestie de Jean mais le mot ne colle pas dans le sens qu’il s’exprime plutôt en énonçant une vérité dont il est convaincu .

En tout cas, il peut répondre de lui-même en expliquant quel baptême il pratique : « d’eau » dit-il, donc un baptême de purification et de repentance et non pas d’initiation dans un groupe ou une secte particulière.

Le passage se termine avec une indication de lieu, ce qui l’ancre dans le réel et sert à lui donner sa validité de témoignage véridique. Comme, on veut toujours se poser des questions, ce qui reste de savoir c’est quand cet échange s’est passé : avant le baptême de Jésus qui est relaté dans la suite du texte ? On ne le sait pas. Certains pensent que c’étaient les anciens disciples de Jean qui ont fait connaître cette anecdote particulière, étant donné que certains d’entre eux comme on va le voir après l’ont quitté pour devenir disciples de Jésus.

* * *

Jean, l’ascète…, qui étant un peu de la même extirpe que Jésus, ne se laisse pas non plus impressionner par les autorités religieuses de son époque et en ce sens est dans la grande tradition des prophètes ( les vrais) qui ne s’inclinent pas devant le pouvoir quel qu’il soit. C’est riche de cette tradition de courage que le peuple juif va concevoir cette catégorie appelée « les justes » pour exprimer leur reconnaissance à ceux et celles qui sont venus au secours de leur peuple à une de ses heures les plus sombres de leur histoire : la Shoa.

On peut donc espérer de lui d’avoir un franc parler et de dire ce qu’il pensait : ses réponses sont succinctes et il n’essaie pas de flatter ou de conforter les idées de ceux qui l’interrogent. Tout le monde le savait et c’est pour cela qu’il était un témoin si important. Si la retransmission de ses paroles ne saurait être du mot à mot, il semble difficile de penser qu’on lui aurait fait tenir des propos envers Jésus contraire à ses convictions.

Quant à savoir, quels étaient ses états d’âme ? Ça c’est une autre histoire : l’anecdote qui suit ce passage nous le montre s’exprimant de nouveau publiquement en présence de Jésus mais on n’aura pas d’anecdote rapportée où les deux se seraient parlés en privé, ni où Jean se serait exprimé avec ses disciples loin du regards des foules. La seule information sur ses états d’âme et c’est déjà beaucoup, est quand il était en prison et qu’il a eu des doutes sur l’identité de Jésus.

Dans notre monde contemporain où les limites entre vie privée et vie publique sont brouillées et où avec les réseaux sociaux nos idoles étalent leurs états d’âme et racontent les moindre détails de leur vie quotidienne, avec les évangiles, évidemment on reste sur sa faim. Alors on scrute le moindre détail le moindre mot pour essayer de savoir ce que les rédacteurs de l’époque n’ont pas vu l’intérêt de raconter et de rapporter.

Jean, ce personnage fascinant, est réduit à son rôle de témoin : tant pis pour nous !

N.B Pour aller plus loin :

van der Merwe, D. G. (1999). The historical and theological significance of John the Baptist as he is portrayed in John 1. Neotestamentica, 33(2), 267–292. http://www.jstor.org/stable/43070280

Amphoux, C.-B. (2017). L’IDENTITÉ ET LA FONCTION DE JEAN LE TÉMOIN (JN 1, 6). Revue Des Sciences Philosophiques et Théologiques, 101(1), 31–48. http://www.jstor.org/stable/44630270

Hughes, J. H. (1972). John the Baptist: The forerunner of God Himself. Novum Testamentum, 14(3), 191–218. https://doi.org/10.2307/1560229

50 ans et plus

le 30 août 2022, Auvergne,

Hier,

50 ans et plus…, de vie commune,

faite de moments intenses et d’autres à moitié vides…

de moments de certitudes

et de doutes,

de moments de confiance

et de méfiance

de moments de communion

et d’incompréhension

***

50 ans et plus,

qu’on a marché ensemble,

quelquefois

l’un à coté de l’autre,

d’autres

l’un devant l’autre,

et d’autres encore

l’un traînant derrière l’autre…

***

50 ans et plus

pendant lesquels, on a beaucoup bourlingué (comme on dit),

où il aurait suffit d’un rien

pour que la mort nous fauche en chemin,

tellement la route était dangereuse

et le parcours incertain…

***

et aujourd’hui je m’étonne

que l’on soit encore en vie,

paisiblement

assis

l’un à côté de l’autre…

***

Pour cette grâce que tu nous a donné,

À Toi Jésus,

qui a marché à côté de nous,

ensemble et séparés,

Un grand Merci !

Fourmi ou cigale?

dimanche 28 août, 2022, Auvergne

C’est le temps des mûres, des derniers apéros dehors…de la rentrée des classes..

Pas encore le moment de craindre le froid

ni de se blottir à l’intérieur,

et d’alimenter le poêle à bois

Encore le temps d’être cigale ou papillon

sans souci du lendemain

l’hiver est encore loin…

***

La cigale, pourtant,

on le sait bien,

« …ayant chanté
Tout l’été,
Se trouva fort dépourvue
Quand la bise fut venue »

Alors que la fourmi elle,

qui ne baissa pas les bras,

un seul instant

Ne manqua de rien….

Mais cette fourmi donnée en exemple

à cause de sa prévoyance,

n’était pas particulièrement

bienveillante….

Quand la cigale affamée, vint lui demander de l’aide au milieu de l’hiver…

La Fourmi n’est pas prêteuse :
C’est là son moindre défaut.
Que faisiez-vous au temps chaud ?
Dit-elle à cette emprunteuse.
– Nuit et jour à tout venant
Je chantais, ne vous déplaise.

– Vous chantiez ? j’en suis fort aise.
Eh bien! dansez maintenant.

Et voilà ! Vlan ! Prends ça en pleine figure !

Et cette fable originellement d’Ésope, réécrite en français par le sieur La Fontaine,

était enseignée à tous les enfants de l’école,

pour qu’ils apprennent quoi ?

Pas à être généreux en tout cas…

Alors, tant pis, pour la Fontaine,

tant pis pour les leçons de l’école laïque et gratuite…

En cette magnifique journée de beau temps

moi je préfère l’insouciance de la cigale

et la confiance à la prévoyance…

Et pour me donner raison,

Je citerai plutôt :

« C’est pourquoi je vous dis…Ne vous inquiétez pas pour votre vie de ce que vous mangerez, ni pour votre corps, de quoi vous serez vêtus. Regardez les oiseaux du ciel: ils ne sèment ni ne moissonnent, et ils n’amassent rien dans des greniers; et votre Père céleste les nourrit. Ne valez-vous pas plus qu’eux […]  Ne vous inquiétez donc pas du lendemain; car le lendemain aura soin de lui-même. »

En plus, aujourd’hui, c’est dimanche !

* * *

N.B le poème de la Fontaine tout entier :

La Cigale et la Fourmi

Jean de La Fontaine

La Cigale, ayant chanté
Tout l’été,
Se trouva fort dépourvue
Quand la bise fut venue :
Pas un seul petit morceau
De mouche ou de vermisseau.
Elle alla crier famine
Chez la Fourmi sa voisine,
La priant de lui prêter
Quelque grain pour subsister
Jusqu’à la saison nouvelle.
« Je vous paierai, lui dit-elle,
Avant l’Oût, foi d’animal,
Intérêt et principal.  »
La Fourmi n’est pas prêteuse :
C’est là son moindre défaut.
Que faisiez-vous au temps chaud ?
Dit-elle à cette emprunteuse.
– Nuit et jour à tout venant
Je chantais, ne vous déplaise.
– Vous chantiez ? j’en suis fort aise.
Eh bien! dansez maintenant.

Et maintenant la citation de Jésus dans l’évangile de Mathieu…(6 : 25….34)


« Ne vous inquiétez pas pour votre vie de ce que vous mangerez, ni pour votre corps, de quoi vous serez vêtus. Regardez les oiseaux du ciel: ils ne sèment ni ne moissonnent, et ils n’amassent rien dans des greniers; et votre Père céleste les nourrit. Ne valez-vous pas plus qu’eux ? Qui de vous, par ses inquiétudes, peut ajouter une coudée à la durée de sa vie? Et pourquoi vous inquiéter au sujet du vêtement? Considérez comment croissent les lis des champs: ils ne travaillent ni ne filent ;

cependant je vous dis que Salomon même, dans toute sa gloire, n’a pas été vêtu comme l’un d’eux […] Ne vous inquiétez donc pas du lendemain; car le lendemain aura soin de lui-même. »

Entre beaucoup et rien

le 22 août, 2022, Auvergne

En fouillant dans mes archives…

Qu’est ce qu’une vie humaine ?

On n’en finira jamais de se poser la question,

C’est à la fois beaucoup et rien du tout

***

Beaucoup

Des milliers ou plutôt des millions d’instants pleins à craquer,

d’émotions, de sensations, de réflexions

de paroles dites et de paroles tues,

d’expériences profondément vécues,

où l’on se sent exister si fort,

dans ce corps qui est le nôtre

qu’on se croit au centre de l’univers,

autour duquel tout le reste vit et s’agite…

Et pourtant le rien

en même temps

nous poursuit sans cesse

et défait à chaque instant qui s’écoule

le moment précédent…

***

Comment se fait-il que l’on puisse se souvenir

de ce qui s’est passé hier,

et qui pourtant a disparu

comme si c’était encore présent  aujourd’hui ?

Comment se fait-il

que puisse exister en nous le passé, le présent et l’à venir …

Dans ce corps bien vivant qui d’un moment à l’autre,

peut redevenir poussière

sans que rien ne change dans l’univers ?

***

Ce n’est pas Dieu qui est un mystère,

Dieu, il est compréhensible qu’il soit ….

incompréhensible

c’est l’être humain,

moi, nous,

qui posons problème,

tous ces « moi »

qui peuplent notre planète depuis des millénaires

et qui sont chacun pleins à craquer

mais qui pourtant peuvent disparaître

en un claquement de doigts

***

Je continue à m’étonner,

vraiment m’étonner

de ce contraste entre d’un côté

ce plein à craquer

et de l’autre,

ce vide total

ce trou béant,

ce néant définitif…

***

Quid alors de l’immortalité ?

Impossible d’évoquer la condition humaine sans parler d’immortalité,

sans envisager la pérennité de toute vie humaine

comme une évidence à la fois incontournable

et improuvable

entre le beaucoup d’aujourd’hui

et le rien du tout.

De demain

***

Chimère ou évidence ?

Étonnement ou émerveillement?

Entre les deux,

Foi peut-être

tout simplement !

***

A voir ton ciel, dis le poète en s’adressant à Dieu, ouvrage de tes doigts, la lune et les étoiles que tu fixas,

qu’est-ce que l’homme pour que tu penses à lui, le fils d’un homme, que tu en prennes souci ?

Psaume 8 : 4-5

La magie des saisons

le 17 août 2022, Auvergne

la magie des saisons,

On m’a expliqué il y a très longtemps pourquoi, il y avait des saisons… et j’ai de vagues souvenirs de ces explications scolaires ( j’étais nulle en géographie et je le suis encore) : la terre tourne, on est plus ou moins proche du soleil et plus ou moins loin de l’Équateur…alors, après l’été vient l’automne où les feuilles changent de couleur avant de tomber parce que les arbres doivent se préparer pour le froid etc, etc., je ne sais plus trop bien…mais sûrement, il y avait eu une longue explication , bien argumentée avec croquis, photos et cartes à l’appui…

Eteffectivement, j’ai bien constaté qu’il y avait des pays où j’ai vécu où il n’y avait pas de saisons, sauf la saison des pluies … et c’était déroutant  mais peut-être plus déroutant encore, il y en a eu où elles étaient bien au nombre de 4 mais elles étaient à l’envers ( pour moi, pour les habitants elles étaient à l’endroit)… pourtant, le corps et l’esprit s’habituent peu à peu à un autre rythme, à un autre passage du temps et ce qui semblait étrange voire exotique au début, devient la norme.

N’empêche que

Ce passage tellement soudain de la chaleur sèche et brûlante de vendredi dernier à la fraîcheur humide de lundi, après une nuit de tonnerre et d’éclairs m’a surpris…

Comment est-il possible, me suis-je demandée que le changement ait été si brusque, si total, si apparemment inéluctable…

Sans qu’on n’ait rien fait ?

Car ce n’était pas un changement dans le paysage que j’ai noté : tout était au même endroit, les fleurs, les feuilles, les arbres, les fruits….les champs étaient toujours aussi brûlés même si maintenant il y avait quelques pousses vertes qui sortaient de terre

C’était quelque chose de plus subtil dans l’atmosphère qui avait changé…

Alors, je me suis rendue compte que les journées avaient bien rétrécies…que la clarté du jour qui me réveillait le matin arrivait plus tard et que le soir, la nuit était tombée plus tôt quand je fermais les volets…

Toute préoccupée par l’activité des êtres humains, leurs guerres et querelles sans fin, mais aussi toute occupée par les tâches quotidiennes pour prendre soin des amis et proches de passage,

je ne l’avais pas vu venir l’automne…

Et je m’étonne,

ou surtout je m’émerveille

que ce soit toujours Toi,

Dieu

le Roi

de l’univers…

L’été est fini!

(note: cette photo a été prise en Virginie, le 13 août)

 Le 15 août 2022, Auvergne

Finalement...l’orage est venu et la pluie est tombée,

(un jour après qu’un feu se déclare dans un champ, risquant d’embraser des bois à proximité et rendant nécessaire l’intervention de 5 casernes de pompiers…)

Je n’aurais jamais cru qu’ici en Auvergne région montagneuse et boisée, riche en eau , je puisse attendre avec tant d’impatience la venue des pluies : ça c’était quand j’habitais dans des pays désertiques où la saison pluvieuse ne durait que quelques jours et était indispensable à la survie des habitants…

Après le 15 août disaient les gens du coin quand toutes les prédictions semaine après semaine annonçaient des pluies qui n’apparaissaient pas…..

et effectivement, ils avaient raison… même si ce ne fut pas le 15 mais le 14 au petit matin,

que la pluie bienfaitrice est arrivée… annoncée à grand renfort de coups de tonnerre et d’éclairs

Du coup, la fête du village a pu bien se dérouler…

très arrosée au début,

(pour les courageux qui faisaient rôtir à la broche sous la pluie les sangliers malheureux qui venaient de je ne sais où, chassés je ne sais quand)

très arrosée ensuite à l’heure du repas,sous les bâches installées au-dessus de longues tables où se pressaient jeunes et moins jeunes, mamies et papis, enfants dans des poussettes, venus des alentours pour des retrouvailles familiales,

et en réalité très arrosée toute la journée,

grâce à la buvette très concourue, où l’on offrait un verre du plus à un voisin, ou à un ami perdu de vue. tout à la joie de se revoir…

Une belle éclaircie en fin d’après-midi,

a permis que le concours de pétanque se déroule sans contre-temps…et que les enfants puissent profiter du petit stand forain et des toboggans gonflables installés sur la place.

Mais pas de feu d’artifice malheureusement, à la nuit tombée ( par décret préfectoral)

Par contre le bal lui, s’est bien déroulé… et à deux heures du matin, la musique qui jouait à fond continuait à raisonner dans l’unique rue du village où on entendait aussi les rires des derniers fêtards…

* * *

Aujourd’hui le calme est revenu, l’air s’est rafraîchi, et le 15 août, cette année, ça veut vraiment dire que l’été est fini ! ​

Personne n’a jamais vu Dieu…sauf

le 5/10 août, 2022, Auvergne

Ce prologue de Jean m’oblige à avancer à petits pas…à peine une phrase à la fois. C’est vraiment un texte méditatif et contemplatif…

(Je découvre un article intéressant écrit par une théologienne sud-africaine… ça m’intéresse vraiment de lire des commentaires et des analyses qui ne viennent ni d’Européens, ni d’Américains du Nord qui sont considérés comme les grosses pointures de l’exégèse biblique et qui dominent les débats. Quoique l’auteure soit d’origine européenne, vivre en Afrique du Sud ne peut que déteindre sur sa manière d’envisager le sens du monde qui l’entoure. En tout cas j’ai trouvé très éclairant son analyse sur la relation entre Jésus et le temple En général, comme les textes bibliques ne sont pas « occidentaux » la perspective de ceux qui viennent de milieux culturels où la communication orale continue à être importante et où la dimension spirituelle et religieuse du monde est une évidence, peut certainement nous faire découvrir des significations qui ne nous sauteraient pas aux yeux. Surtout, après des décades où le texte a été aseptisé par des théories qui ont voulu les vider de leur contenu pour ne s’intéresser qu’à leur structure de peur de perdre leur approche scientifique… Après tout, on a à faire à des textes sacrés dont la dimension spirituelle est intrinsèque, on ne peut donc pas faire l’impasse sur leur signification sans les amputer : une perspective uniquement scientifique ne saurait jamais être satisfaisante.)

Jean 1 : 15-18

Jean lui rend témoignage et il clame : ” C’est de lui que j’ai dit : Celui qui vient derrière moi, le voilà passé devant moi, parce qu’avant moi il était. “

Oui, de sa plénitude nous avons tous reçu, et grâce pour grâce.

Car la Loi fut donnée par Moïse ; la grâce et la vérité sont venues par Jésus Christ.

Nul n’a jamais vu Dieu ; le Fils unique, qui est tourné vers le sein du Père, lui, l’a fait connaître.

* * *

Jean lui rend témoignage et il clame : ” C’est de lui que j’ai dit : Celui qui vient derrière moi, le voilà passé devant moi, parce qu’avant moi il était. “

Jean fait sa réapparition, de nouveau ancrant le texte dans le temps historique. On ne peut pas éviter de penser que la mention de cet homme qui apparaît au milieu de ce prologue atteste de la révérence et du respect que les personnes auxquelles il s’adresse, lui portait. Jean apparaît comme fondamental pour rendre crédibles les déclarations faites sur Jésus : il est un témoin dont la fiabilité ne fait pas de doute.

On a imaginé beaucoup de situations différentes pour expliquer l’importance qu’il avait au moment de l’écriture de ce prologue entre autres que les disciples proches de Jean étaient encore en vie ce qui dans ce cas, affecterait la date du texte ( il n’aurait pas été écrit aussi tardivement qu’on le croyait, à savoir aux environs de 90) ou au contraire que longtemps après la mort et la résurrection de Jésus, il y avait encore des groupes qui se revendiquaient uniquement de Jean le Baptiste et qu’il fallait les convaincre de la suprématie de Jésus pour qu’ils se rallient à eux… Quelque soit le cas, il a certainement une place d’honneur dans ce prologue qui sera développée un peu plus loin…

Oui, de sa plénitude nous avons tous reçu, et grâce pour grâce.

On en revient maintenant au Logos, au Verbe, à la Parole et on a cette déclaration extraordinaire qui s’adresse à celui et celle pour lesquels cette vérité ou révélation est affirmée…l’idée que l’on a accès à tout ce qu’il est, que rien de ce que Jésus est, ne nous est soustrait ! C’est époustouflant ! Cela suppose un don total de sa personne, tellement contraire à l’idée du maître, ou du gourou ou d’une divinité quelconque même qui veut garder pour lui une partie de son pouvoir et de son savoir afin de dominer sur les autres ! De cette plénitude qu’il partage avec nous, découle que le don de la grâce qu’il nous offre ne s’arrête jamais; ce n’est pas une bonne fois pour toutes que l’on reçoit la grâce mais jour après jour, tant que nous vivons : la grâce qui vient de Jésus est un ruisseau qui ne tarit jamais… !

Car la Loi fut donnée par Moïse ; la grâce et la vérité sont venues par Jésus Christ.

Rappel pour ceux qui sont juifs et enseignement pour ceux qui ne le sont pas : Moïse est cité comme précédant Jésus et posant une première pierre de la révélation de Dieu à l’être humain mais plus précisément au peuple juif auquel il sera demandé expressément de garder cette Loi et de la mettre en pratique. De nouveau, apparaissent ces deux mots « grâce et vérité » comme définissant la nature de Jésus-Christ, qui est présenté comme un second Moïse mais qui en même temps lui est supérieur comme dans un crescendo où il complète et sublime la révélation de Dieu pour l’être humain : il est évident que l’on monte d’une marche pour arriver au sommet dans la déclaration suivante.

Nul n’a jamais vu Dieu ; le Fils unique, qui est tourné vers le sein du Père, lui, l’a fait connaître.

Encore une fois, une allusion à Moïse : certainement, ceux qui connaissaient les écritures juives savaient que Moïse n’avait pas pu voir Dieu : quand Il avait demandé à voir le visage de Dieu, il avait essuyé un refus, nous dit le livre de l’Exode (33 : 18-20)

Moïse dit: Fais-moi voir ta gloire! L’Éternel répondit: Je ferai passer devant toi toute ma bonté, et je proclamerai devant toi le nom de l’Éternel; je fais grâce à qui je fais grâce, et miséricorde à qui je fais miséricorde. L’Éternel dit: Tu ne pourras pas voir ma face, car l’homme ne peut me voir et vivre »

Et pourtant, Moïse était très proche de Dieu, est- il rapporté un peu plus haut..

« Moïse était entré dans la tente, la colonne de nuée descendait et s’arrêtait à l’entrée de la tente, et l’Éternel parlait avec Moïse. [. . .]L’Éternel parlait avec Moïse face à face, comme un homme parle à son ami »

(Peut-être est-ce justement à cause de sa proximité avec Dieu que Moïse avait cru qu’il pouvait le voir dans sa gloire car ici le texte parle d’un face à face mais qui ne doit pas être pris littéralement étant donné ce qui sera expliqué plus tard.)

On est là donc dans une dimension nouvelle : Jésus n’est semblable à aucun autre, il entre dans une catégorie qui n’existait pas auparavant, auquel personne d’autre n’appartient et c’est ce statut nouveau de fils « unique, au sein du père » qui donnera lieu à toute une réflexion qui conduira plus tard à imaginer un concept trinitaire comme une tentative de cerner et d’intégrer cette dimension nouvelle.

Est-ce que celui qui a écrit ces lignes s’est rendu compte de la portée de ce qu’il avait écrit ? Est-ce que ceux qui l’ont lu ou entendu se sont rendus compte de ce que cela pouvait signifier quand on pense que pendant plus de 2000 ans ce texte a interrogé des milliers penseurs dans leur recherche d’une définition de Dieu ?

Si véritablement cette déclaration a été inspirée par Dieu (ce que je crois), on ne peut que s’exclamer comme Jésus, quand après avoir demandé aux disciples ce que disaient de lui les gens Pierre a répondu à la question, « et vous, qui dites que je suis? » de la manière suivante :

« Simon Pierre répondit: Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant. Jésus, reprenant la parole, lui dit: Tu es heureux, Simon, fils de Jonas; car ce ne sont pas la chair et le sang qui t’ont révélé cela, mais c’est mon Père qui est dans les cieux. »

Gageons donc que c’est le même Père qui a inspiré cette déclaration extraordinaire de ce texte!

* * *

Finalement, je suis arrivée à la fin de cette section appelée communément prologue de Jean…

Je n’avais pas remarqué auparavant à quel point, il était rattaché aux textes de l’Ancien Testament et surtout à la figure de Moise…car on pense plus à Abraham, le père de la foi qu’à Moise qui pourtant est le libérateur du peuple juif, celui qui l’a guidé dans le désert et celui qui est monté sur le Sinaï où il s’est tenu devant la présence de Dieu pour recevoir les fameuses tables de la Loi qui ont scellé le destin de ce peuple et lui ont donné son ADN. Une découverte en quelque sorte pour moi qui y voyait avant à cause du mot Logos, uniquement un texte grec…

La présence de Jean au milieu de ce texte aussi, qui apparaît incongrue, m’a surprise mais je découvre à quel point elle est importante en réalité pour notre époque où la notion de lumière/vérité est devenue populaire dans la mouvance « new age » pour qu’elle ne soit pas récupérée et assimilée à une notion vague, éthérée, atemporelle, une gnose où soit totalement absent le Jésus de Nazareth. Peut-être que l’intention de l’auteur en le mentionnant était d’inciter les disciples de Jean à se rallier au « Ressuscité » mais il a ancré pour toujours ce traité de théologie et de philosophie dans l’histoire de la Palestine du 1er siècle grâce à un de ses contemporains, les plus connus, dont la fin tragique est attestée, Jean le Baptiste, prophète bien aimé.

En même temps, l’idée qu’il ait pu être un hymne sinon chanté du moins proclamé à la louange de Jésus le met dans la catégorie de textes à méditer et à contempler dans la conception moderne de la méditation : un texte duquel on ne peut s’approcher qu’en faisant le vide dans notre tête, qu’en renonçant à toute velléité de raisonnement ou d’analyse, abandonnant toute catégorie de pensée pour se laisser saisir par l’Esprit de Dieu dans le silence de l’âme

À donc lire et relire tout en entier mais à méditer phrase par phrase :

Au commencement était la Parole, et la Parole était avec Dieu, et la Parole était Dieu.

Elle était au commencement avec Dieu.

Toutes choses ont été faites par elle, et rien de ce qui a été fait n’a été fait sans elle.

En elle était la vie, et la vie était la lumière des hommes.

La lumière luit dans les ténèbres, et les ténèbres ne l’ont point reçue (ou étouffée)

Il y eut un homme envoyé de Dieu: son nom était Jean.

Il vint pour servir de témoin, pour rendre témoignage à la lumière, afin que tous croient par lui.

Il n’était pas la lumière, mais il parut pour rendre témoignage à la lumière.

Cette lumière était la véritable lumière, qui, en venant dans le monde, éclaire toute personne.

Elle était dans le monde, et le monde a été fait par elle, et le monde ne l’a point connue.

Elle est venue chez les siens, et les siens ne l’ont point reçue.

Mais à tous ceux qui l’ont reçue, à ceux qui croient en son nom, elle a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu, lesquels sont nés,

non du sang, ni de la volonté de la chair, ni de la volonté de l’homme, mais de Dieu.

Et la Parole a été faite chair, et elle a habité parmi nous, pleine de grâce et de vérité; et nous avons contemplé sa gloire, une gloire comme la gloire du Fils unique venu du Père.

Jean lui a rendu témoignage, et s’est écrié: C’est celui dont j’ai dit:

Celui qui vient après moi m’a précédé, car il était avant moi.

Et nous avons tous reçu de sa plénitude, et grâce sur grâce;

car la loi a été donnée par Moïse, la grâce et la vérité sont venues par Jésus-Christ.

Personne n’a jamais vu Dieu; Dieu le Fils unique[a], qui est dans le sein du Père, est celui qui l’a fait connaître.

N.B Pour aller plus loin :

La référence du texte cité au début :(Mouton, E. (2016). Torah Reimag(in)ed between σάρξ and δόξα? Implied Household Ethos in the Fourth Gospel. Neotestamentica, 50(3), 93–112. https://www.jstor.org/stable/26417622)

Durand, E. (2004). ΛΟΓΟΣ, ΜΟΝΟΓΕΝΗΣ ET ΥΙΟΣ: QUELQUES IMPLICATIONS TRINITAIRES DE LA CHRISTOLOGIE JOHANNIQUE. Revue Des Sciences Philosophiques et Théologiques, 88(1), 93–103. http://www.jstor.org/stable/44408797

Cri du coeur

le 4 août, 2022, (jeudi) Auvergne

Sécheresse encore….demain nous dit-on 80 % de précipitations, mais c’est ce qu’ils nous annoncent depuis 3 semaines, précipitations le vendredi.. et puis, quand le moment se rapproche les prévisions diminuent comme une peau de chagrin et finalement on a eu 5 gouttes d’eau… vraiment 5 gouttes…, je les ai comptées !

De l’autre côté de l’Atlantique ce sont les inondations : au Kentucky, un de ces États pauvres et délaissés depuis la fin de l’exploitation des mines de charbon…qui d’ailleurs avait apporté une richesse toute relative aux habitants du pays : les gens qui travaillaient dans la mine avaient une vie dure et mouraient jeunes de maladie des poumons, sans parler des éboulements fréquents qui les enterraient vivants… cet État déjà mal loti se retrouve à présent sous les eaux…

( l’église à laquelle on appartient y avait élaboré tout un projet éducatif pour soutenir ses populations délaissées qu’on avait eu l’occasion de visiter : aux dernières nouvelles tous les bâtiments et résidences ont été submergés…il faut dire que dû à la pauvreté, peu de maisons étaient construites en dur, l’habitat le plus courant étant les mobiles homes)

Trêve qui est reconduite au Yémen ( mais pour combien de temps?)… la guerre en Ukraine continue et selon les experts va durer des années…la Chine se déchaîne contre Taiwan après la visite de Pelosi, famine en Somalie , les camps de réfugiés sont pleins …bref notre monde est mal en point…

Les grands continuent d’opprimer les petits, jouissant d’une impunité éhontée, les grandes compagnies pétrolières et de gaz enregistrent des profits records, les riches se pavanent sur tous les médias,… (faisant rêver bien souvent ceux qui vivent dans la précarité) et on ne sait plus où donner de la tête avec les experts qui veulent nous expliquer que notre sexualité humaine n’est pas ce que l’on croit être ajoutant un sujet d’angoisse de plus  aux adolescents en recherche de leur identité.

Mon cri du cœur :

Que ton règne arrive, que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel. La volonté de Dieu est bonne et juste, elle est que les captifs soient libérés, que les opprimés soient délivrés, que les grands et les puissants soient déposés, que la vérité soit révélée etc… Il y a tellement de textes dans les psaumes et les prophètes, repris par Jésus et ses disciples qu’on n’en saurait douter à moins d’être de mauvaise foi ou de ne pas connaître ces écrits..

En voici quelques-uns, parmi tant d’autres… :

Ne dépouille pas le pauvre, parce qu’il est pauvre, Et n’opprime pas le malheureux à la porte; Car l’Eternel défendra leur cause, Et il ôtera la vie à ceux qui les auront dépouillés … dans Proverbes…

ll fait droit aux opprimés; Il donne du pain aux affamés; L’Eternel délivre les captifs; L’Eternel ouvre les yeux des aveugles; L’Eternel redresse ceux qui sont courbés; L’Eternel aime les justes. L’Eternel protège les étrangers, Il soutient l’orphelin et la veuve, Mais il renverse la voie des méchants. Psaume 146 7-9

et probablement le texte appelé magnificat où Marie, future mère de Jésus s’exclame :  Il a déployé la force de son bras; Il a dispersé ceux qui avaient dans le coeur des pensées orgueilleuses. Il a renversé les puissants de leurs trônes, Et il a élevé les humbles. Il a rassasié de biens les affamés, Et il a renvoyé les riches à vide. Luc 1 : 51-53)

Mais pourquoi avons nous besoin de prier pour que cette volonté de justice et de paix en faveur de l’humanité s’accomplisse ?

Serait-ce parce-que la terre nous a été confiée et que tout ce qui s’y passe ne peut pas se faire sans qu’on y participe d’une manière ou d’une autre ? Si ce sont des êtres humains prédateurs qui causent tant de mal, pourquoi d’autres ne pourraient-il pas œuvrer à côté de Dieu pour que le règne de paix et justice (shalom en hébreu) advienne comme l’a demandé Jésus ? ( il a aussi dit que le royaume de Dieu était advenu avec sa venue)

* * *

N.B : Pour aller plus loin je trouve sur l’internet cette excellente contribution https://contributionsafricaines.com/2014/03/03/dieu-est-le-defenseur-des-opprimes/

Summer

le 2 août, 2022, Auvergne

On est donc passé au mois d’août, il fait chaud et tous les français ( ou presque) sont en vacances…

La sécheresse ici continue.

Les fontaines du village où l’eau n’a pas cessé de couler malgré tout, permettent que l’on puisse arroser les quelques fleurs dont les couleurs égayent le cœur au milieu des pelouses et des champs qui ressemblent à des vrais paillassons …

Chaque jour, on nous annonce presque solennellement que la lumière du jour diminue : -3 minutes disait la voix douce d’une femme invisible à la télévision

Les couchers de soleil, eux se succèdent à l’horizon pavoisant des oranges et des rouges d’une gamme infinie , indifférents semble-t- il au peu d’intérêt que nous leur portons nous, dont le regard ne se pose que quelques minutes sur leur beauté passagère…

Le ciel, la nuit quand on pousse la porte de la maison est toujours aussi étoilé et impossible à capturer dans son immensité: on ne peut que regarder et contempler.

J’ai presque oublié qu’il pouvait faire froid ! Les manteaux, les pulls, les gants et les écharpes qui encombrent mon armoire semblent totalement superflus.

S’il n’y avait pas la sécheresse, je m’accommoderais bien de cette chaleur qui me réchauffe le corps et me permet de rester la nuit dehors…

* * *

Cette planète que tu nous a léguée, elle est tellement belle !

et elle continue à l’être,

malgré les ruines de la guerre, la pollution de l’air et les visages émaciés des enfants affamés ,

qui racontent l’histoire triste de ces humains à qui tu l’avais confiée

Alors que les cieux, eux continuent à proclamer ta gloire…

« Les cieux racontent la gloire de Dieu, Et l’étendue manifeste l’œuvre de ses mains. Le jour en instruit un autre jour, La nuit en donne connaissance à une autre nuit… »

Mais jusques à quand ?

***

Pour aller plus loin : le psaume 19 en entier

Au chef des chantres. Psaume de David.
Les cieux racontent la gloire de Dieu, Et l’étendue manifeste l’œuvre de ses mains.
Le jour en instruit un autre jour, La nuit en donne connaissance à une autre nuit.
Ce n’est pas un langage, ce ne sont pas des paroles Dont le son ne soit point entendu:
Leur retentissement parcourt toute la terre, Leurs accents vont aux extrémités du monde, Où il a dressé une tente pour le soleil.
 Et le soleil, semblable à un époux qui sort de sa chambre, S’élance dans la carrière avec la joie d’un héros;
Il se lève à une extrémité des cieux, Et achève sa course à l’autre extrémité: Rien ne se dérobe à sa chaleur.
 La loi de l’Éternel est parfaite, elle restaure l’âme; Le témoignage de l’Éternel est véritable, il rend sage l’ignorant.
Les ordonnances de l’Éternel sont droites, elles réjouissent le cœur; Les commandements de l’Éternel sont purs, ils éclairent les yeux.
La crainte de l’Éternel est pure, elle subsiste à toujours; Les jugements de l’Éternel sont vrais, ils sont tous justes.
 Ils sont plus précieux que l’or, que beaucoup d’or fin; Ils sont plus doux que le miel, que celui qui coule des rayons.
Ton serviteur aussi en reçoit instruction; Pour qui les observe la récompense est grande.
Qui connaît ses égarements? Pardonne-moi ceux que j’ignore.
Préserve aussi ton serviteur des orgueilleux; Qu’ils ne dominent point sur moi! Alors je serai intègre, innocent de grands péchés.
Reçois favorablement les paroles de ma bouche Et les sentiments de mon cœur, O Éternel, mon rocher et mon libérateur!

Contemplation

le 15/27 juillet, Auvergne 2022

On attend toujours la pluie…peut-être demain ?

Jean 1:14

Et la parole a été faite chaire ( homme), et elle a habité parmi nous, pleine de grâce et de vérité; et nous avons contemplé sa gloire, une gloire comme la gloire du Fils unique venu du Père.

***

Et la parole a été faite chaire ( homme),/ et le Verbe s’est fait chair

Que peut-on dire sur le sens de cette phrase qui s’en réfère à une réalité ineffable , indescriptible, incompréhensible? Tous les commentaires que je lis sur cette expression s’appuient sur les mots en grec qui la composent et dont les différents exégètes étudient le sens en les mettant en relation avec leur usage dans des textes variés, bibliques et autres même si les variations sémantiques qui en résultent restent assez limitées. C’est dans l’étude de la linguistique que se déploient leurs talents ou leurs connaissances car on touche là à un domaine où les recherches scientifiques n’ont pas grand-chose à apporter : on entre de plain pied dans le territoire de la philosophie et la théologie. Le choix qui est fait pour l’un ou l’autre sens d’un mot cache derrière des enjeux dogmatiques énormes car on touche à la question de la divinité de Jésus, une des pierres angulaire de la doctrine chrétienne qui s’est développée et affinée aux premiers siècles et dont on n’en finit jamais de discuter.

En tout cas, cette déclaration, évoque pour moi le moment où pendant l’ordinaire de la messe, le prêtre se met à genoux en l’énonçant solennellement … il me semble que c’est un geste tout à fait approprié…

Devant une telle déclaration, on ne peut que s’agenouiller et rester en silence

Elle a habité parmi nous

(ça fait drôle que ce soit au féminin, à cause du genre grammatical du mot parole…on est ici obligé de passer au masculin pour désigner Jésus car lui était bien un homme. Avec la question du langage inclusif, on se rend compte qu’on a du mal maintenant à penser le féminin et le masculin dans un autre cadre que la distinction mâle/femelle) : dans ce sens la traduction « verbe »qui est un mot masculin facilite les choses, en grec le mot λόγος est masculin )

Il est venu vivre chez nous, avec nous, partager notre vie…

(Je pense à cela aujourd’hui où j’ai le plaisr d’avoir la maison pleine de monde dû à la visite de nièces qui ont fait l’effort de venir jusqu’à chez nous pour passer quelques jours avec tous leurs enfants. Et en cette période de vacances, aller au fin fond de l’Auvergne dans une maison qui n’a pas de piscine, qui n’est pas au bord de la mer et dans un village sans un seul commerce, même pas une boulangerie ce n’est pas rien, même si finalement ils ont adoré! )

Il a habité parmi nous

Pas au-dessus de nous comme les rois et les grands qui cherchent à nous gouverner, pas au-dessous non pluscomme les mendiants qui cherchent à nous inspirer pitié…

Il était au milieu, parmi, avec, au coude à coude,

indiscernable d’aucun autre, vivant au sein d’une famille juive comme tous ceux autour de lui,

mangeant, dormant, parlant,

travaillant pour gagner son pain,

jusqu’au jour où au grand étonnement de tous et surtout de ses proches, il est parti en mission et s’est révélé être…

Le mystère est trop grand pour essayer de le comprendre, de le raisonner ou de le cerner.

Cette fois-ci, devant cette déclaration, ce n’est pas un sentiment de révérence que je ressens, mais degratitude profonde : que Jésus/le logos/la lumière ait vécu le quotidien, dans son train train ennuyeux et répétitif, ou au contraire dans son imprévisibilité de tragédies et de joies, donne de la valeur et du sens à chaque moment de la vie. Rien n’y est plus anodin, tout y a sa place : le matériel aussi bien que le spirituel, l’important aussi bien que l’insignifiant.

Pleine de grâce et de vérité;

Deux mots que l’on n’associe pas naturellement…l’idée de grâce est celle d’indulgence, de bienveillance, de miséricorde. Par contre, au contraire, vérité est celle d’intransigeance, de rigidité d’inflexibilité : on connaît l’expression « toute vérité n’est pas bonne à dire » car elle décrit la réalité telle qu’elle est, elle n’arrondit pas les angles pour faire plaisir… elle est sans concession…

L’alliance des deux est incongrue, inattendue… mais en réalité bienvenue. La grâce seule voudrait dire accepter l’aveuglement, l’injustice, se refuser à reconnaître la réalité du mal et de son pouvoir destructeur (comme quelquefois on croit être le cas pour le pardon) mais alliée à la vérité, « le devoir de vérité » comme on le dit si bien, elle y gagne en stature et devient un surcroît de bonté sans effacer ou justifier le mal, sans nous laisser happer par les ténèbres qui nous entourent.

Et la vérité sans grâce ? Destructrice ! Il ne vaut mieux pas y penser…

et nous avons contemplé sa gloire,

Ici l’auteur entre dans une nouvelle dimension, celle du témoignage. Il sort du domaine de la théologie ou de la philosophie pour parler de ce que lui et d’autres ont vu: ce n’est pas une déclaration de foi, ou l’affirmation d’une croyance particulière, mais l’attestation d’une réalité personnelle vécue. « on l’a vu de nos propres yeux, on n’invente rien, c’est vrai ! » Ce témoignage donne une assise à ce qui avant apparaît comme construction de l’esprit. On peut déconstruire une pensée mais pas un témoignage : seule la remise en cause de la probité du témoin peut en détruire la valeur…

comme la gloire du Fils unique venu du Père.

On retourne maintenant à la déclaration de foi sur la nature et l’identité de Jésus. Beaucoup ont essayé de minimiser la force de cette affirmation « fils unique du père » en mettant en valeur le fait que fils de Dieu a été utilisé dans d’autres contextes, mais le mot « unique » (μονογενής, ές monogène https://www.bible.audio/lexique-grec-3439-monogenes.htm ) est difficile à ignorer, surtout après tout ce qui le précède.

* * *

Il y a tellement à méditer dans cette simple phrase… tellement !  Il faut la lire et la relire…lentement, la  contempler en quelque sorte

(.Je préfère pour la relire utiliser le mot Verbe au lieu de parole…. le passage du féminin au masculin me gêne)

Et le Verbe s’est fait chair,

il a habité parmi nous,

plein de grâce et de vérité.

et nous avons contemplé sa gloire,

la gloire du Fils unique,

Venu du Père

L’apothéose, elle vient après pour nous simples mortels qui nous nous sentons quelquefois tellement vides et sommes tellement assoiffés:

Et nous avons tous reçu de sa plénitude, et grâce pour grâce

***

N.B Pour aller plus loin…mais il y a tellement d’articles !

Dur and, E. (2004). ΛΟΓΟΣ, ΜΟΝΟΓΕΝΗΣ ET ΥΙΟΣ: QUELQUES IMPLICATIONS TRINITAIRES DE LA CHRISTOLOGIE JOHANNIQUE. Revue Des Sciences Philosophiques et Théologiques, 88(1), 93–103. http://www.jstor.org/stable/4440879

Dans le champ de la christologie du quatrième évangile, la présente réflexion met en lumière la complémentarité entre les titres de Λόγος et de Μονογενής, termes respectivement relatifs à ὁ Θεός et à ὁ Πατήρ dans le cadre du prologue. Elle considère ensuite l’acception du titre Υἱός lorsqu’il est qualifié par Μονογενής au chapitre 3. Cette double approche nous conduit à souligner que Μονογενής a une fonction théologique précise dans le quatrième évangile : rendre possible une relecture « trinitaire » du titre Υἱός.

SIEGWALT, G. (1981). INTRODUCTION À UNE THÉOLOGIE CHRÉTIENNE DE LA RÉCAPITULATION (Remarques sur le contenu dogmatique du prologue de Jean). Revue de Théologie et de Philosophie, 113(3), 259–278. http://www.jstor.org/stable/44352946