Du 18 -26 juin, 2025, Auvergne
Je suis vraiment de retour maintenant : c’est la saison des foins et paraît-il que cette année le fourrage est abondant et de bonne qualité. Je retrouve le rythme lent et campagnard de personnes éloignées de la vie active et je n’attends pas de visiteurs…je peux souffler et reprendre cette étude.
Par contre, lui Jésus, il est en pleine polémique…
Jean 7 : 25-52
Les interrogations continuent
Quelques habitants de Jérusalem disaient alors : « N’est-ce pas celui qu’on cherche à tuer ?
Le voilà qui parle ouvertement, et personne ne lui dit rien ! Nos chefs auraient-ils vraiment reconnu que c’est lui le Christ ?
Mais lui, nous savons d’où il est. Or, le Christ, quand il viendra, personne ne saura d’où il est.
La foule de toute évidence ne sait sur quel pied danser…est-ce lui le Christ, le messie ou pas lui ? Ils cherchent donc conseil auprès des experts pour se faire une opinion et l’attitude de ces derniers les jette dans une plus grande confusion : rien d’étonnant dans tout cela, des réactions tout à fait normales d’autant plus qu’on trouve les mêmes schéma aujourd’hui dans notre société sauf que les experts que l’on consulte sont sur les plateaux télé ou les réseaux sociaux…
Jésus, qui enseignait dans le Temple, s’écria : « Vous me connaissez ? Et vous savez d’où je suis ? Je ne suis pas venu de moi-même : mais il est véridique, Celui qui m’a envoyé, lui que vous ne connaissez pas.
Moi, je le connais parce que je viens d’auprès de lui, et c’est lui qui m’a envoyé. »
On cherchait à l’arrêter, mais personne ne mit la main sur lui parce que son heure n’était pas encore venue.
Jésus change de lieu et il n’est plus dehors s’adressant à une foule quelconque mais dans un lieu officiel le temple, ses auditeurs, il faut s’y attendre incluent donc des spécialistes de la loi auxquels il s’adresse directement et auprès desquels il continue de défendre sa vocation d’envoyé de Dieu sans donner pour autant des éclaircissements.
Jésus accusé de populisme ?
Dans la foule beaucoup crurent en lui, et ils disaient : « Le Christ, quand il viendra, accomplira-t-il plus de signes que celui-ci n’en a fait ? »
Les pharisiens entendirent la foule discuter ainsi à son propos. Alors les grands prêtres et les pharisiens envoyèrent des gardes pour l’arrêter.
Réaction de nouveau des uns et des autres et comme justement la foule risque de le suivre, l’urgence de le faire taire se fait plus pressante pour les dirigeants politiques et religieux qui se préoccupent de l’engouement pour sa personne
Jésus déclara : « Pour un peu de temps encore, je suis avec vous ; puis je m’en vais auprès de Celui qui m’a envoyé.
Vous me chercherez, et vous ne me trouverez pas ; et là où je suis, vous ne pouvez pas venir. »
Les Juifs se dirent alors entre eux : « Où va-t-il bien partir pour que nous ne le trouvions pas ? Va-t-il partir chez les nôtres dispersés dans le monde grec, afin d’instruire les Grecs ?
Que signifie cette parole qu’il a dite : “Vous me chercherez, et vous ne me trouverez pas, et là où je suis, vous ne pouvez pas venir” ?
Le malentendu se manifeste de nouveau entre les experts de la loi et Jésus qui parle d’une manière énigmatique cherchant à les confondre plutôt qu’à les éclairer semble-t-il, ce qui fait que leur interprétation qui prend les paroles de Jésus au pied de la lettre est tout à fait plausible : en mentionnant l’existence de cette diaspora juive que Jésus irait peut-être rejoindre et qui vient souvent à Jérusalem pour les fêtes, le rédacteur du texte donne un socle d’historicité inattendu à cet épisode en situant la source nécessairement, me semble-t-il, avant la destruction de Jérusalem en 70
Au jour solennel où se terminait la fête, Jésus, debout, s’écria : « Si quelqu’un a soif, qu’il vienne à moi, et qu’il boive,
celui qui croit en moi ! Comme dit l’Écriture : De son cœur couleront des fleuves d’eau vive. »
En disant cela, il parlait de l’Esprit Saint qu’allaient recevoir ceux qui croiraient en lui. En effet, il ne pouvait y avoir l’Esprit, puisque Jésus n’avait pas encore été glorifié.
Dans la foule, on avait entendu ses paroles, et les uns disaient : « C’est vraiment lui, le Prophète annoncé ! »
Maintenant on a une indication de temps sans préciser le lieu, où l’on entend Jésus qui laissant de côté la polémique sur sa légitimité, fait cette magnifique offre d’eau vive qu’il est venu apporter pour étancher notre soif et dont il est la source. D’ailleurs la foule répond avec enthousiasme le déclarant être le prophète annoncé …(Élie, le messie?) mais non sans que l’évangéliste se voie auparavant dans l’obligation de nous expliquer la signification de ses paroles, interrompant l’épisode raconté, montrant bien la distance dans le temps de la susdite déclaration et l’explication de l’évangéliste ( personnellement, je trouve que c’est un peu dommage mais bon… )
Cependant la polémique repart de plus belle avec cette opposition entre la foule crédule et facilement séduite et convaincue selon les autorités religieuses lesquelles continuent à vouloir le faire arrêter
D’autres disaient : « C’est lui le Christ ! » Mais d’autres encore demandaient : « Le Christ peut-il venir de Galilée ?
L’Écriture ne dit-elle pas que c’est de la descendance de David et de Bethléem, le village de David, que vient le Christ ? »
C’est ainsi que la foule se divisa à cause de lui.
Quelques-uns d’entre eux voulaient l’arrêter, mais personne ne mit la main sur lui.
Ici entre en jeu, un nouveau groupe de personnes, ceux qui sont chargés de faire exécuter les ordres des autorités ( les gardes, soit la police) appartenant certainement socialement parlant au peuple et qui hésitent à exécuter les ordres de leurs supérieurs…ce qui est vraiment intéressant
(en tout cas ça me rappelle de l’histoire de ces quelques policiers qui n’ont pas voulu participé dans la trop fameuse rafle du Vélodrome d’hiver en 1942 pour arrêter les juifs pour montrer qu’on n’est pas toujours obligé d’obéir aux ordres de ses supérieurs…évidemment il n’ en a pas eu des masses…mais pour Jésus, il semble que cette fois-là, ça a été la majorité)
Les gardes revinrent auprès des grands prêtres et des pharisiens, qui leur demandèrent : « Pourquoi ne l’avez-vous pas amené ? »
Les gardes répondirent : « Jamais un homme n’a parlé de la sorte ! »
Les pharisiens leur répliquèrent : « Alors, vous aussi, vous vous êtes laissé égarer ?
Parmi les chefs du peuple et les pharisiens, y en a-t-il un seul qui ait cru en lui ?
Quant à cette foule qui ne sait rien de la Loi, ce sont des maudits ! »
On a vraiment maintenant une mise en évidence de la stratification de la société de l’époque et de comment l’opinion que ses interlocuteurs ont de Jésus dépend étroitement de la place qu’ils occupent sur l’échelle sociale : les réflexions des chefs du peuple témoignent d’un profond mépris de classe envers le peuple qu’ils considèrent ignare notant bien qu’aucun de leur milieu n’aurait été assez bête pour croire en Jésus…
Nicodème, l’un d’entre eux, celui qui était allé précédemment trouver Jésus, leur dit :
« Notre Loi permet-elle de juger un homme sans l’entendre d’abord pour savoir ce qu’il a fait ? »
Ils lui répondirent : « Serais-tu, toi aussi, de Galilée ? Cherche bien, et tu verras que jamais aucun prophète ne surgit de Galilée ! »
Puis ils s’en allèrent chacun chez soi. Réapparaît Nicodème le seul qui appartienne à leur classe sociale et qui ne soit pas hostile à Jésus-Christ : on l’avait presque oub, intrigué par lié, lui qui était venu voir Jésus intrigué par ses déclarations.
Ce que j’en retiens…
Ce qui me frappe vraiment ici, et je ne m’attendais pas à le voir affleurer dans un document si « théologique » que l’évangile de Jean, est une description de la stratification sociale qui met en évidence comment le milieu social auquel on appartient joue un rôle dans nos réactions quand on est confronté à quelqu’un comme Jésus. Le mépris flagrant pour les foules et aussi les reproches faits aux gardes, ces derniers eux-mêmes appartenant à une classe inférieure, de la part des élites est l’argument numéro un qu’ils utilisent pour discréditer Jésus car personne n’appartenant à leur classe sociale ne croie en lui sauf Nicodème …Je ne l’avais jamais autant remarqué.
(un stratagème utilisé encore aujourd’hui pour disqualifier l’opinion de certains groupes d’électeurs envers un leader politique que l’on désapprouve… ces réactions seraient très intéressantes à examiner à la lumière des théories de Bourdieu sur Langage et pouvoir politique)
Et puis comme il arrive souvent dans cet évangile, au milieu d’une polémique musclée suscitée en grande partie par des questions de lutte de pouvoir, on a cette offre extraordinaire d’une eau vive si généreuse que celui qui la reçoit, nous dit Jésus « de son cœur couleront des sources d’eau vives » …
On est rappelé au fait que la mission de Jésus n’est pas de passer son temps à s’engager dans des querelles théologiques stériles avec les experts de la loi, mais elle est d’annoncer une bonne nouvelle de la part de Dieu, « Car Dieu a envoyé son Fils dans le monde, non pas pour juger le monde, mais pour que, par lui, le monde soit sauvé » peut-on lire un peu plus haut dans ce même évangile.
Mais pour la recevoir, cette eau vive, encore faudrait-il avoir soif…. et si on est en haut de l’échelle où tous nos désirs peuvent être comblés, comment pourrait-on avoir soif ?
A moins de s’appeler Nicodème, l’exception qui confirme la règle…