Souvenir d’une rencontre fugace

Le 16 0ctobre, Auvergne. 2022

(les journées d’automne sont d’une douceur et d’une beauté incomparable…le réchauffement climatique serait-il un génie bienfaisant?)

Jean 1 : 35-39

Le lendemain, Jean était encore là, avec deux de ses disciples; et, ayant regardé Jésus qui passait, il dit: Voilà l’Agneau de Dieu.Les deux disciples l’entendirent prononcer ces paroles, et ils suivirent Jésus. Jésus se retourna, et voyant qu’ils le suivaient, il leur dit: Que cherchez-vous? Ils lui répondirent: Rabbi (ce qui signifie Maître), où demeures-tu? Venez, leur dit-il, et voyez. Ils allèrent, et ils virent où il demeurait; et ils restèrent auprès de lui ce jour-là. C’était environ la dixième heure

De nouveau leurs chemins se croisent

Le lendemain, Jean était encore là, avec deux de ses disciples;

Le lendemain, qu’il faudrait plutôt comprendre comme un autre jour et une autre rencontre, il est mentionné particulièrement que Jean était accompagné de deux de ces disciples, un détail qui en dit long sur la popularité de Jean mais aussi son statut : il avait des gens qui l’écoutaient, le respectaient, le suivaient, il avait des « followers » comme sur facebook ou TikTok où je ne sais quelle autre application. L’indication de lieu « encore là » donne aussi l’idée que c’était un lieu public où les gens venaient échanger et écouter ceux qui étaient considérés comme des « maîtres », des rabbis, des connaisseurs de la loi…mais pas un lieu fermé comme une synagogue ou la maison d’un particulier

et, ayant regardé Jésus qui passait, il dit: Voilà l’Agneau de Dieu.

Ils se sont croisés mais ils ne se sont pas adressés la parole, en tout cas Jésus ne s’est pas arrêté pour le saluer… cependant Jean en le voyant lui redonne son nom d’Agneau de Dieu déjà utilisé, sans plus ( j’aime l’interprétation qui dit que c’était plutôt le mot serviteur qu’il faut comprendre, il rend la scène plus plausible) Et cette fois-ci, il se passe quelque chose de nouveau, et d’inattendu après que Jean ait vu Jésus et l’ait nommé « agneau de Dieu » , ses disciples le quittent pour suivre Jésus.

Les deux disciples l’entendirent prononcer ces paroles, et ils suivirent Jésus.

Pourquoi ont-ils suivi Jésus : pour en savoir plus sur qui il était mais avec l’intention de retourner auprès de Jean et de lui raconter ce qu’ils ont découvert ? Et qu’est-ce que Jean a ressenti quand il les a vus partir ? On ne nous donne aucune indication de sa réaction.

En tout cas, on voit que Jésus ne leur a pas demandé de le suivre et ce n’est qu’en se retournant qu’il se rend compte qu’il est suivi…

Jésus se retourna, et voyant qu’ils le suivaient, il leur dit: Que cherchez-vous? Ils lui répondirent: Rabbi (ce qui signifie Maître), où demeures-tu?

Venez, leur dit-il, et voyez. Ils allèrent, et ils virent où il demeurait; et ils restèrent auprès de lui ce jour-là. C’était environ la dixième heure.

La réponse des disciples n’est pas philosofique, elle est pratique : ils ne disent pas qu’ils cherchent la vérité ou qu’ils veulent connaître son identité, mais qu’ils veulent savoir où il habite… comme quand on rencontre quelqu’un d’intéressant et qu’on lui demande son numéro de téléphone ou son adresse mail pour rester en contact. Ils veulent en savoir plus…Je note aussi que l’auteur ne dit pas qu’ils ont définitivement quitté Jean et sont devenus disciples de Jésus mais que ce jour là, ils sont restés avec lui.

S’il n’y a pas d’indication de lieu, il y a une indication de temps ou plus précisément du moment de cette rencontre. La personne qui a transmise cette information, se souvient de quelle heure il était… quand on raconte un souvenir, il y a pour une raison ou une autre des détails dont on se rappelle et on ne sait pas pourquoi…( dans les enquêtes policières, on voit souvent la question de l’heure qui est posée pour déterminer le moment du crime…) . Certains y voient un sens symbolique…pas moi, une indication que ce sont des anciens disciples de Jean Baptiste qui sont à la source de cette information…

* * *

Après un prologue qui nous a éloigné du réel et du quotidien et nous a transporté hors du temps et de l’espace, dans des considérations théologiques et philosophiques, on a cette scène de rencontre fugace entre deux personnes, Jean le Baptiste et Jésus qui dans sa brièveté est d’une précision et d’un réalisme saisissants.

Jean Baptiste est avec ses disciples dans un lieu public (peu importe où) et Jésus passe par là. Quand il le voit, il le désigne comme étant quelqu’un qui est un homme de Dieu mais en utilisant une formule un peu inattendue, (en tout cas dans le texte) « agneau de Dieu ». Rien ne dit que Jésus, lui, ait vu Jean Baptiste mais en tout cas, il ne semble pas s’arrêter jusqu’à ce qu’il se rende compte qu’il y a des hommes qui le suivent… et c’est à ce moment qu’il s’adresse à eux et que ces disciples de Jean ont l’opportunité d’expliquer leur démarche. C’est bien donc du point de vue de ces disciples que cette anecdote nous est racontée. Elle démontre en tout cas une grande indépendance de leur part qui ne voient pas dans leur attachement à Jean, une loyauté qui leur empêcherait d’aller connaître quelqu’un d’autre ( contrairement aux gourous d’aujourd’hui, car en général ce serait un manque à gagner..)

Après cela, Jean Baptiste disparaîtra complètement du radar de cet évangéliste, mais cette anecdote, nous le présente bien réel quand il était, on a envie de dire, encore en activité. Comme toujours on aimerait en savoir plus car il n’en reste pas moins élusif en même temps que fascinant, quelqu’un que j’aimerais avoir connu en chair et en os ( même s’il ne semblait pas être particulièrement le défenseur des femmes… faut dire que quand on sait que sa mort a été causée par l’une d’entre elles ou plutôt deux, devenues les représentantes types des femmes perverses séductrices des faibles hommes…) mais cette courte scène que je peux visualiser me rend cet évangile vivant…. comme un moment furtif du passé conservé tel quel, arrivé jusqu’à nous après deux mille ans.

De quoi me réconcilier avec un texte qui me paraissait trop dogmatique au début…

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